La victoire de Conchita Wurst était-elle inévitable ?

Il y a deux jours, une bonne partie de l’Europe apprenait l’existence de Conchita Wurst. Deux jours à peine et la gagnante de l’Eurovision doit faire face un torrent d’insultes et d’insinuations sur les méthodes employées pour remporter le concours.

Condamnée Conchita levez-vous ! Vous êtes accusés d’être un personnage créé de toute pièce pour surfez sur une mouvance favorable au lobby LGBT (oui oui j’ai pu lire ça sur twitter).

Décryptons le vote Conchita

Les premières critiques pointent un pseudo “vote communautaire”. A la vue de la répartition des votes à travers l’Europe, cet argument paraît assez faible. En effet, sur les 37 pays votants, seulement 4 n’ont donné aucun point à l’Autriche.

Répartition des votes en faveur de Conchita Wurst

Autre point, on retrouve une bonne homogénéité à travers le continent Européen. Conchita Wurst a récolté 290 points des 37 délégations, soit une moyenne de 7,8 points. 23 délégations sur 37 ont donné plus de points que cette moyenne (8, 10 ou 12 points).

Il y a quelques semaines, les autorités russes avaient envisagé ne pas diffuser la prestation Conchita Wurst. Ironie du sort, les votes russes attribuent 5 points à la chanteuse.

Ho mon Dieu les téléspectateurs n’auraient pas voté Conchita Wurst pour ce qu’elle est, encore moins pour ce qu’elle représente. Ils auraient voté pour sa prestation.

L’Eurovision est un marqueur culturel. Le concours voit naître, se développer les genres musicaux d’une époque particulière.

Céline Dion se présenterait en 2015, il est fort probable que son passage soit un échec. Comme le furent les prestations de Bonnie Tyler et Cascada en 2013.
Qui pense un seconde que Mama Corsica (Patrick Fiori – 1993) ou J’aime la vie (Sandra Kim – 1986) pourrait atteindre le top 10 en 2014 ?

Personne !

La chanson Rise Like A Phoenix est-elle dans l’ère du temps ?

La réponse est sans l’ombre d’un doute : oui. Rise Like A Phoenix fait parti du registre “Power Ballad”. Ce style se caractérise par 3 points :

• la maîtrise de cette montée en puissance;
• l’effet dramatique de la voix;
• l’alternance d’instruments au timbre clair opposés à d’autres, à la sonorité criante ou distordue;

Sur le top 5 de la compétition, quatre chansons sont issues de ce genre musical :

• Rise Like a Phoenix (Conchita Wurst),
• Undo (Sanna Nielsen),
• Not Alone (Aram MP3),
• Running (András Kállay-Saunders)

La chanson entre en raisonnance avec le style de musique attendu par le public que l’Eurovision. Sur la chanson en elle-même, après quelques écoutes, on peut remarquer une construction assez similaire à Skyfall :

• Le même solo de trompette en début et fin de chanson,
• Un bridge similaire,
• Le tempo ressemblant.

Il ne faut pas négliger le talent vocal de Conchita à l’aise sur la chanson. Et vu ce que j’ai dit plus haut (les similitudes avec une chanson du registre d’Adèle), la performance vocale prend tout son sens.

Pour conclure, Conchita Wurst va bien au-delà d’un pseudo vote communautaire. L’Autriche est arrivée à passer au-dessus du vote de copinage (excuse #1 des français “c’est pas juste, les pays frontaliers votent entre eux !!”). La recette gagnante reste donc inchangée : une bonne chanson (dans l’air du temps), une performeuse, avec du charisme !