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Il était une fois les Imagineers : Les rois midas

Il était une fois les Imagineers : Les rois midas

ÉPISODE 3 – Au début des années 80, WED vient de lancer deux projets de grosse ampleur. Bien que la branche parc à thèmes soit plus lucrative que la branche animation elle fait l’objet de grosses coupes budgétaires et d’un plan social d’envergure. Jusqu’à l’arrivée de Michael Eisner

Diarchie à la tête de Disney

Le 23 septembre 1984, le duo Michael Eisner et Frank Wells accède à la tête de Walt Disney Productions. Le premier en qualité de président-directeur général, le second comme président-directeur exécutifCe qui fera le succès de ce binôme c’est sa complémentarité. Michael, le créatif, fourmille d’idées pour dépoussiérer Disney. Frank, le pragmatique, canalise et rationalise les idées Michael. Dans cette répartition des tâches on retrouve un peu le tandem Walt et Roy Disney.

Dès le début de leur mandat, Michael et Frank considèrent WED et les parcs comme le joyau de la couronne Disney. Les parcs ont un gros potentiel mais ils manquent cruellement de modernité. L’emprise qu’exerce Walt Disney, bien que décédé il y a 18 ans, est encore forte. Ils vont travailler à changer les mentalités. Faire en sorte que les imagineers regardent vers le futur plutôt que de se focaliser sur les projets d’attractions avortées à l’époque de Walt Disney.

Direction Endor !

Le parc Disneyland doit se réinventer. Tony Baxter, imagineer qui arrive à saisir à la perfection les goûts et attente du public, sent que la trilogie Star Wars s’installe comme un phénomène culturel mondial. Il propose un concept d’attraction dont l’histoire se base sur cette franchise.
Pour la première fois, une attraction est adaptée d’un film n’appartenant pas à Disney. Pour autant ça n’est complètement incongru. En effet comme le disait Tony Baxter en 1987 « les deux univers se recoupaient. On retrouve dans le cinéma de George Lucas beaucoup des éléments de narration et de suspens des films Disney. Pour moi, cette union des meilleurs créateurs montre la continuité entre les deux.« 

Pour cette nouvelle génération d’attractions, les imagineers se sont inspirés des simulateurs d’avions. À cette époque Star Tours est l’un des premiers cinémas dynamiques. Il projette un film en 70mm. La qualité de projection est un exploit compte tenu des accélérations de 2 à 3 G que subit la salle de projection.

Le saviez-vous ? Le jour de son inauguration les visiteurs les plus malchanceux ont dû attendre 4h avant de pouvoir monter dans un StarSpeeder si bien que la direction de Disneyland décida de laisser le parc ouvert 60 heures d’affilée.

1986 : WED Enterprises devient Walt Disney Imageeiring

Silence… on tourne !

Pour Michael Eisner, les parcs doivent se distinguer les uns des autres. Le succès d’Epcot ne réside-t-il pas dans le fait qu’il ne ressemble pas au Magic Kingdom ?Pour le 3e parc Disney construit sur le sol américain, le choix s’est porté sur la création d’un immense studio de cinéma qui se visiterait. Walt Disney avait toujours eu envie de proposer au visiteur de découvrir les coulisses de la création d’un film. Ce voeu est sur le point d’être réalisé !

Pour ce nouveau parc à thèmes, Disney noue un partenariat avec la MGM. Il permettra aux touristes d’avoir un aperçu de la production américaine dans les années 1930 / 1940. À la base ce parc était pensé comme une offre d’appoint, en complément du Magic Kingdom et Epcot. Une demi-journée devait suffire à faire le tour de ce complexe. Sous l’impulsion de Michael Eisner, qui a chaque point d’étape sur ce projet avançait une nouvelle idée d’attraction, Disney-MGM Studio est devenu un parc à part entière. Son attraction phare, The Great Movie Ride, était un parcours scénique qui emmenait les visiteurs à travers des scènes célèbres du cinéma.

Splash Mountain : faire du neuf avec du vieux

À la fin des années 80 un constat est accablant sur Disneyland : la zone Bear Country n’est pas attractive. La seule attraction qu’elle compte, America Sings, doit fermer ses portes en 1988. Il faut trouver quelque chose pour dynamiser cette zone du parc. Compte tenu du climat Californien, le choix s’est portée sur une attraction de type flume.

Tony Baxter imagine une attraction sur le thème Mélodie du sud, le film Disney le plus adapté à l’essence du land Bear Country. Et comme rien ne se perd 75 à 80 audio-animatronics d’America Sings sont réutilisés. Splash Mountain est inauguré le 17 juillet 1989, le jour du 34e anniversaire de Disneyland. À l’origine elle devait être lancée 9 mois plus tôt.

Splash Mountain à Tokyo Disneyland

Saviez-vous que la hauteur de la chute finale de Splash Mountain mesure 17,5 mètres, soit l’équivalent d’un immeuble de 5 étages ? Ma tête terrifiée sur la photo de l’attraction vous confirme que le finish est impressionnant.

La recette d’une attraction réussie

Pour Tony Baxter, imagineer à qui nous devons par exemple Big Thunder Mountain ou encore Star Tours, le leitmotiv qui doit guider un concepteur d’attraction est « qu’est ce qui va pousser un visiteur à refaire 20 fois une attraction ?« . Pour répondre à cette question 3 ingrédients sont essentiels :

  • Projeter les visiteurs dans un monde impossible à visiter en dehors de Disneyland. Une réalité virtuelle aux accents biens réels.
  • Les sensations fortes. Donner au passager d’une attraction l’illusion de frôler la mort sans qu’il ne prenne aucun risque.
  • L’attrait émotionnel.

Euro Disney et le péché d’orgueil

Dès la signature de la convention entre Disney et l’État français, on peut noter un premier faux pas de la part de la multinationale américaine. Offrir à Jacques Chirac, Premier ministre, un celluloïd de Blanche-Neige recevant la pomme empoisonnée des mains de la sorcière. Le symbole est fort et a été largement utilisé par les opposants à ce projet.

Cette incompréhension va perdurer dans le temps. Certains cadres de Disney vendaient la construction de la destination de la façon suivante « nous construisons un ouvrage immortel comme les pharaons ont bâti les pyramides« . Une réflexion qui manque d’humilité, surtout compte tenu du passé culturel et artistique des pays européens.

Les réponses à cette vision, assez prétentieuse, du projet Euro Disney ne se sont pas faites attendre. Les médias français s’en sont donné à coeur en associant le parc à thèmes à un Tchernobyl culturel. Un mélange atroce de plastique, de carton-pâte et de folklore crétin. Bonne ambiance.

Euro Disney : un niveau d’exigences élevé

Walt Disney avait créé le parc le plus enchanteur, Roy Disney le plus spectaculaire. Michael Eisner voulait créer le plus beau parc jamais construit. Pour cela, il demanda aux imagineers de faire preuve d’une très grande minutie vis-à-vis du moindre détail.Rapidement le château devint un des points d’attention du projet. Quel style donner à cet élément central du parc sachant que la France est le pays des châteaux par excellence ? L’accent va être porté sur l’exagération et l’imaginaire. Les imagineers vont s’inspirer des illustrations qu’Eyvind Earle avait réalisées pour la préparation du dessin animé La Belle au bois dormant.

Pour ce projet, il fallait ajouter des touches d’authenticité pour que ce décor grandeur nature paraisse crédible. Pour cela, Disney a fait appel à des artisans de toutes l’Europe pour la création de tapisseries, de vitraux…

Le saviez-vous : les vitraux du château de La Belle au bois dormant ont été réalisés par Paul Chapman, qui avait eu en charge la restauration des vitraux de Notre-Dame de Paris. Retraité au moment de la construction d’Euro Disney, il a accepté de reprendre les outils pour ce projet.

Euro Disney : un premier résultat (très) décevant

Six ans après la signature de la convention avec l’État français Euro Disney est inauguré… et l’entreprise déchante. Avec seulement 6,8 millions de visiteurs la première année, la fréquentation est 15% en deçà de ce qui avait été prévu. La crise économique que connaît la France au début des années 90 ainsi que les campagnes de presse assassines ne plaident pas en faveur du parc. Le taux d’occupation des hôtels est lui aussi poussif. Il ne dépasse pas les 60%.

Deux ans après son ouverture, Euro Disney est au bord du dépôt de bilan. Une restructuration financière est nécessaire pour maintenir le parc à flot. À cette occasion le parc change de nom. Exit le préfix Euro, associé au commerce, et place à la marque Paris qui évoque la romance et la magie.

Euro Disney : une leçon d’humilité

Cette série documentaire est l’occasion pour certains acteurs de l’époque de faire leur mea culpa vis-à-vis de ce projet. Pour d’autres, de faire une analyse juste sur la stratégie qui aurait dû être mis en place pour le développement de Disneyland Paris. Le cas Euro Disney n’a pas été éludé ou enjolivé. Disney endosse le fait que cette destination touristique, profitable depuis son rachat par Disney en 2017, a longtemps été un caillou dans sa chaussure.

« On a fait l’erreur de penser qu’on pouvait faire payer la même chose à un visiteur en France et à un visiteur en Floride. On a été idiot. On a construit trop d’hôtels, on a dépensé trop d’argent » Michael Eisner – président-directeur général de Walt Disney Productions.

« Je ne pense pas qu’on ait trop poussé l’imagineering. On a conçu un parc extraordinaire et c’est ce qu’il fallait faire pour attirer le public local. Il faut d’abord que le parc soit le joyau de la couronne. Ensuite, seulement, on peut se préoccuper des infrastructures à l’extérieur du parc et une fois qu’elles marchent on peut réinvestir dans le joyau de la couronne » Tom Morris – directeur artistique de Fantasyland.

« Disneyland Paris a montré qu’on pouvait dépenser trop dans la création d’un parc » Bruce Vaughn, chief creative executive.

Space Mountain : la pépite qui s’est faite attendre

Dès la phase de conception d’Euro Disney, un projet de type Space Moutain était envisagé. Mais comment l’intégrer de façon cohérente dans un Discoveryland aux accents steampunk ? De plus cette attraction, créée en 1975 commence à dater. Il faut lui donner une seconde jeunesse.

Il aura fallu attendre 1995, et un retour à bonne fortune, pour que Space Mountain arrive à Disneyland Paris. Même si le nom a été conservé, la version parisienne présente 3 grosses nouveautés :

  • la création du premier système de lancement par catapulte inclinée,
  • l’intégration du premier système audio embarqué qui diffuse une musique synchronisée avec le parcours,
  • trois inversions.

Disney-MGM Studios : expansion vitesse grand V

Parallèlement aux déboires de Disneyland Paris, Disney-MGM Studios continue son expansion : Star Tours en 1989 ou encore Muppet’s Vision 3D en 1991. En 1994, ce parc va voir la naissance d’une attraction qui va devenir un incontournable des parcs Disney à travers le monde : Tower of Terror. Il s’agit d’un partenariat entre Walt Disney Imageeiring et Otis.

13,6 mètres par seconde, c’est la vitesse à laquelle vous tombez soit plus vite qu’en chute libre.

Nouveau partenariat Walt Disney Imageeiring / Lucas Film

Dans les années 90 les simulateurs ont le vent en poupe. Si bien que Walt Disney Imageeiring se met à plancher sur un projet qui allierait un simulateur en mouvement dans un décor réel. Un simulateur, intégré dans une (fausse) carcasse de camion est alors mis au point. C’est autour de ce nouveau concept de véhicule que fut créée l’attraction Indiana Jones Adventure.

Pour faire place à cette nouvelle attraction, Disneyland modifie le tracé du monorail et déplace 500 arbres de Jungle Cruise.

reddit

Avec Indiana Jones Adventure, Walt Disney Imageeiring est au sommet de son art en matière de thématisation. La file d’attente, labyrinthique, permet aux visiteurs d’atteindre les vestiges d’un ancien temple. Les imagineers souhaitant donner l’illusion de se retrouver sur un site archéologique, ils proposent aux visiteurs d’être acteurs de l’expérience en déchiffrant, tout au long de leur cheminement, des messages dans une langue ancienne fictive grâce à une table de correspondance symboles <> lettes mis à sa disposition. Le visiteur devient spectacteur.

disneyfoodblog.com

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Ce 3e épisode s’achève sur la mort de Frank Wells dans un accident d’avion. Il laisse Michael Eisner seul à la tête de Disney. Cette page qui se tourne fait place à une ère où la création ne sera plus portée aux nues. Maintenant tout devra avoir un but, une raison d’être au lieu d’être seulement beau. La thématisation devient un gros mot. La flamme s’éteint. Disney ne croit plus à l’appétence du grand public pour les parcs à thèmes. Refroidis par l’échec de Disneyland Paris, les projets de nouveaux parcs sont à l’arrêt.